French Theory : reception dans les arts visuels aux Etats-Unis entre 1965 et 1995
Bruxelles / 12/5/2011 - 14/5/2011
Organisé par le Lieven Gevaert Research Centre for Photography
Nombreux sont les artistes américains, actifs dans la seconde moitié du XXe siècle, à avoir nourri leur réflexion et leur pratique des apports de la philosophie, des études littéraires et des sciences sociales. À cet égard, un certain nombre d’auteurs français ont bénéficié très tôt d’un intérêt soutenu. Parmi ceux-ci, on retrouve des figures majeures comme Claude Lévi-Strauss, Roland Barthes, Pierre Bourdieu, Michel Foucault, Jacques Lacan, Louis Althusser, Jean-François Lyotard, Jean Baudrillard, Jacques Derrida ou Gilles Deleuze. Autant de penseurs dont les écrits en sont venus à constituer le corpus de ce que l’on désigne désormais sous l’appellation de French Theory. La fortune de cette pensée française dans les milieux universitaires américains à partir du milieu des années 1970 et de ses premiers usages académiques – contribuant notamment à l’émergence des Cultural studies – a fait l’objet de plusieurs études, dont l’important ouvrage consacré à cette question par François Cusset en 2003. Cependant, la réception de cette pensée dans le domaine plus spécifique des arts visuels n’a encore fait l’objet de recherches systématiques que très rarement, et de manière relativement dispersée. Citons à cet égard certains travaux de Sylvère Lotringer, envisageant les pratiques artistiques postérieures au milieu des années 1970, et de Sande Cohen. Il reste cependant avéré qu’à la faveur de premières traductions, de colloques, de voyages ou de la présence elle-même sur le territoire de l’un ou l’autre auteur, certains artistes purent avoir progressivement accès à divers textes de ce corpus dès la seconde moitié des années 1960. La perspective de ce colloque sera donc l’étude de la réception de cette « pensée française » dans le domaine des arts visuels à partir de 1965 et jusqu’en 1995, veille d’un mouvement d’évaluation critique de l’influence de ces auteurs sur la pensée intellectuelle américaine, initiée entre autres par la désormais fameuse « affaire Sokal ».
Afin de cerner cet épisode, trois problématiques ou axes de réflexion peuvent être avancés, sans caractère d’exhaustivité.
Un premier axe de recherche concerne les relais dans la diffusion de la pensée de ces auteurs français. Il s’agira ainsi de relever les biais et événements par lesquels s’est historiquement opérée la diffusion de leurs écrits auprès des artistes, de circonscrire d’éventuelles phases successives de diffusion des auteurs sur le continent américain (selon un premier examen devant être réévalué ou nuancé à l’occasion du colloque : Lévi-Strauss, Barthes ; Foucault, Lacan, Bourdieu et Lyotard ; Baudrillard, Deleuze et Derrida), ou encore de cerner le rôle de relais qu’ont pu potentiellement jouer certains artistes et certaines revues en Angleterre.
Un second axe concerne la réception de cette pensée française. Ainsi pourra-t-on chercher à mettre au jour la compréhension que certains artistes pionniers pouvaient posséder du structuralisme dans la seconde moitié des années 1960, ou à cerner chronologiquement le moment d’une véritable réception. Il s’agira également de s’intéresser aux éléments ou conditions culturelles, intellectuelles et éventuellement politiques qui ont pu, au cours de ces trois décennies, contribuer à la formation d’un contexte propice à la réception de cette pensée, ou ceux qui, au contraire, ont pu en entraver la réception et l’assimilation. En outre, il s’agira de s’intéresser aux sélections opérées par les artistes dans les textes, les concepts et les thèses de ces différents auteurs, et, partant, aux transformations qu’ils ont de la sorte fait subir à leur pensée.
Un troisième axe s’intéressera enfin à l’application ou la mise en pratique des leçons ou acquis de la pensée de ces différents auteurs par les artistes d’une part et leurs commentateurs d’autre part. À partir d’un certain nombre d’études de cas couvrant l’ensemble de ces trois décennies, il s’agira de mettre au jour les bénéfices tirés et les changements subis par les pratiques visuelles au contact de cette French Theory. Par ailleurs, d’un point de vue historiographique, la pertinence des outils d’analyse que cette pensée a pu fournir aux critiques et aux historiens de l’art eux-mêmes pour l’étude de ces pratiques pourra également être évaluée.
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