12 août 2009

Expo: Luzia SIMONS

Expo: Luzia SIMONS
Du 02 avril au 16 octobre 2009
La Grange aux Abeilles

Luzia Simons propose elle aussi un voyage dans la couleur à travers une série de scannogrammes grand format de tulipes dépixélisées et repixélisées. Il ne s’agit pas de scanner des reproductions de tulipes, mais bel et bien de scanner les fleurs elles-mêmes.
Les motifs sont fragmentés, ultra précis dans le détail et agrandis jusqu’à l’inconcevable.
L’appareil photo est à l’image de l’oeil humain. Sa construction obéit aux lois naturelles de l’optique avec ses mécanismes physiques : lentille convexe, rayons lumineux focalisés, accommodation à la distance de l’objet. Il est doté d’un point de vue individuel équipé d’une surface de réception sensible à la lumière qui crée une image virtuelle de la réalité. La dimension manquante de la profondeur est compensée par le théorème de la perspective.
Le scanner, contrairement à l’appareil photo, n’a pas de point de vue. L’ancien poste d’observation, jadis stable, s’est mis en mouvement et transformé en manière de voir. Le scanner ne comporte ni lentille ni point focal, ne connaît ni perspective ni ligne de fuite. A la manière d’un aveugle, il appréhende la réalité par tâtonnements, stockant côte à côte avec la plus haute précision et la plus grande régularité les pixels de l’image. Tout ce qui se trouve au premier plan est pour lui clair et net, tandis que la profondeur de champ se dissout dans une obscurité floue. C’est comme si le scanner était la technique appropriée à une mondialisation pleinement en marche.
Ce n’est pas par hasard que Luzia Simons scanne des tulipes. La tulipe et son bulbe, jadis aussi précieux que l’or, originaires non de Hollande mais d’Iran et de Turquie où ils symbolisent encore aujourd’hui la vie d’un individu aimé, revêtent pour Luzia Simons un intérêt artistique particulier. La confusion culturelle et la perte d’identité mais aussi, en contrepartie, l’enrichissement à travers l’échange, sont les sujets que l’artiste thématise depuis longtemps, dans des oeuvres telles que « Transit », « Face Migration », « Luftwurzeln » (Racines aériennes).
La référence baroque à la beauté et à la fugacité des choses est avant tout ironique. En revanche, ces tulipes se mettent résolument en scène et deviennent les acteurs d’un grand drame chromatique. Pourtant, il ne s’agit pas d’individus. L’artificialité de la surface scannée, cette image parfaitement plane, d’une précision micrographique, réfléchit la frontière entre image et réalité à la manière d’un épiderme sensible.

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